À LA DÉCOUVERTE DES CANAUX, RIVIÈRES ET ÉCLUSE
La construction du canal du Midi
Pour comprendre la genèse du canal du Midi, il faut d’abord visiter le musée du canal du Midi au lac de Saint-Ferréol, à proximité immédiate de la ville de Revel. Ouvert en 2008, le musée explique clairement, à l’aide de maquettes, de dessins, d’outils et de présentations audiovisuelles, comment Pierre-Paul Riquet (1609-1680), concepteur et exécutant/constructeur de ce projet colossal, a réalisé la liaison entre l’Atlantique et la Méditerranée. En 1667, débutent le creusement du canal de Sète à Toulouse et la construction d’un réservoir de 67 ha à Saint-Ferréol, près de Revel, à mi-chemin entre ces deux villes, qui sera alimenté par les eaux de la Montagne noire. Ce réservoir a aujourd’hui une fonction essentiellement récréative. Baptisé Canal Royal du Languedoc, le canal a été rebaptisé Canal du Midi après la Révolution française (1789-1799).
Plus de 12 000 ouvriers, hommes et femmes, ont réalisé ce travail gigantesque en 14 ans. Un canal de 20 mètres de large et de 2 mètres de profondeur, d’une longueur de 241 kilomètres, avec pas moins de 64 écluses, est alors en place. Riquet ne vit pas l’achèvement de l’œuvre de sa vie. Il meurt le 1er octobre 1680, sept mois avant que le premier bateau n’emprunte “son” canal. Le canal est aujourd’hui classé au patrimoine mondial de l’Unesco.
Début à Revel
Nous commençons notre exploration par le musée, puis nous descendons à Revel. La ville est une bastide et possède des rues rectangulaires caractéristiques. À ne pas manquer, la halle symétrique de 39 x 39 mètres du XIVe siècle, dont la charpente repose sur 79 piliers de chêne. Le tout est surmonté d’un beffroi plus tardif. Le magasin de vélos local nous fournit des vélos pour notre premier trajet d’environ 50 kilomètres, qui nous mènera jusqu’à l’écluse de Gardouche, le long du canal du Midi. La piste cyclable, joliment nommée “Parcours Cyclable de la Rigole de la Plaine”, longe le canal qui “arrose” le Canal du Midi. Quoi qu’il en soit, il fait un beau temps d’automne ensoleillé et un fort vent arrière. Le long du parcours, il y a (pour ceux qui ont l’œil) beaucoup de choses à voir. Dans un champ fauché, quelques tournesols ont survécu à la récolte et se dressent fièrement au soleil. Nous posons nos vélos sur l’accotement et allons (nous le savons d’avance) prendre une belle photo. En passant par le lac de Lanclus, nous atteignons notre destination principale à La Bastide d’Anjou : le canal du Midi.
Le Canal du Midi
Il s’agit essentiellement de passer d’une écluse à l’autre. Sur les anciennes maisons des éclusiers, des panneaux indiquent aux plaisanciers le nom de l’écluse et la distance jusqu’à l’écluse suivante. Les éclusiers n’existent plus ; les plaisanciers doivent manœuvrer eux-mêmes les écluses ! Il vaut évidemment la peine de jeter un coup d’œil à une telle écluse et de réfléchir à l’excellent travail accompli ici il y a des siècles. Il est conseillé de demander à l’avance les deux cartes d’itinéraire gratuites (voir encadré). Sur ces cartes, les cyclistes trouveront toutes les informations nécessaires sur l’itinéraire, d’une part, mais aussi sur les endroits où des hôtels, des chambres d’hôtes et des campings attendent les cyclistes. Les commerces, restaurants et autres sont également indiqués. Un outil indispensable pour planifier en route et à l’avance. Par exemple, nous avons déjeuné à l’Ecluse de Castenet. Nous étions alors déjà proches de la ville universitaire de Toulouse (environ 450 000 habitants). Une étape inévitable sur la route entre les deux mers.
Toulouse
En entrant dans la ville, on se heurte à la statue blanche de Pierre-Paul Riquet, pour ainsi dire. Il se tient debout, dos à “son” canal, regardant fièrement la ville comme pour dire : “J’ai réussi à bien faire ce travail”. De la tranquillité qui règne le long du canal, on entre dans une ville animée et pleine de choses à voir. La Garonne divise la ville en deux parties. Le Pont Neuf et le Pont Saint-Pierre relient les deux parties anciennes du centre-ville. Les amateurs de soleil ont trouvé une place sur les rives du fleuve pour profiter du soleil d’automne. D’autres flânent sur les boulevards et peuplent les terrasses. Nous nous sommes laissés conduire dans un vélo-taxi pour faire un tour dans la ville. Dans de nombreuses villes, il y a encore un cocher pour faire le tour de la ville, mais ici, c’est un jeune homme qui pédale et ses invités s’assoient à l’abri derrière lui. Vous passez ensuite devant les hauts lieux de la ville : la basilique Saint-Sernin, le plus grand monument roman d’Europe, et la place du Capitole, où se trouve l’hôtel de ville. Un bâtiment imposant. Une image à l’intérieur comme à l’extérieur. La ville est appelée la ville rouge parce que la plupart des maisons sont construites en briques rouges. Mais ce n’est pas tout. La ville a été le berceau du supersonique Concorde, de la fusée Arian et de l’Airbus A 380. Toulouse a un nom à défendre en matière d’aérospatiale.
Canal de Garonne
Nous poursuivons notre route. À partir de Toulouse, le canal du Midi se fond dans le canal de Garonne (ou canal des Deux Mers). La situation reste la même : canal, platanes se dressant comme des piliers blancs le long de l’oued, écluses, etc. Mais sur la route de Bordeaux, on rencontre deux ouvrages d’art remarquables. À Montech, on passe devant un ascenseur à bateaux de 443 mètres de long, où un système ingénieux permet de franchir les six mètres de dénivelé du canal pour la navigation depuis 1974. Il s’agit d’une sorte de toboggan. À Montech, il est possible d’emprunter un canal latéral pour se rendre à Montauban, la ville située le long du Tarn. C’est ce même Tarn que nous passons juste avant Moissac. C’est là que se trouve un autre ouvrage d’art de grande qualité. Un aqueduc de 356 mètres fait passer le canal à travers le Tarn. Quand on veut prendre des photos, on espère naturellement qu’il y a de la navigation sur le canal et sur la rivière, mais ce n’était malheureusement pas le cas lors de notre passage. Et puis la beauté s’est approchée de Moissac !
Moissac
Commençons par le fait que Moissac se trouve sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. En fait, il s’agit ici d’une activité à petite échelle qui passe facilement inaperçue. Autour de la ville, on trouve des vignobles de chasselas, dont on tire un vin blanc frais. Dans la ville, l’abbaye de Saint-Pierre, classée au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco. Le plus impressionnant est le cloître de 1100, considéré comme unique au monde. Soixante-seize chapiteaux sculptés aux représentations variées méritent que l’on s’y attarde. Les pigeons volants s’en donnent à cœur joie !
Avis d’expert
En explorant certaines parties de l’itinéraire, nous avons rencontré à deux reprises un couple de Diegem qui avait parcouru l’intégralité de l’itinéraire de Narbonne à Bordeaux à vélo. Ils étaient venus avec leur vélo en train de Bruxelles à Narbonne en passant par Paris et revenaient en train de Bordeaux. Nous avons ensuite interrogé ce couple de sportifs sur leurs expériences. À l’aller, le plus excitant a été de rouler dans l’obscurité à travers Paris, de la gare du Nord à la gare d’Austerlitz. Et puis on se retrouve à la gare de Narbonne à six heures du matin et le voyage à vélo peut commencer ! Ce n’est pas pour rien que cet itinéraire a été choisi.
En effet, au cours du circuit, on passe par des villes intéressantes comme Carcassonne, Toulouse, Moissac et on arrive enfin à Bordeaux. L’hébergement s’est fait dans des hôtels et des chambres d’hôtes comme indiqué dans le guide d’Oteman (voir encadré). Compte tenu de la nature particulière des villes, nous avons passé deux nuits à Carcassonne et à Toulouse. L’itinéraire a été parcouru en 11 jours de vélo, ce qui représente une moyenne journalière de 55 kilomètres.
Sur la qualité des pistes cyclables, ils disent ce qui suit : “Dans la première partie, du Canal du Midi à Toulouse, les pistes cyclables, bien praticables, étaient en gravier fin. Cependant, il y avait régulièrement des problèmes avec les racines saillantes des platanes. Les pistes cyclables étaient agréables car il n’y avait pratiquement pas de ligne droite de plus de 100 mètres. Sur le tronçon de Toulouse à La Réole, les pistes cyclables ressemblaient à un billard, mais les lignes droites étaient beaucoup plus longues. Pour nous, ce n’était pas du tout monotone.
À La Réole, nous avons quitté le canal et nous sommes entrés dans les vignobles avec de beaux paysages. Ce tronçon jusqu’à Sauveterre-la-Guyenne s’est déroulé sur de petites routes où nous n’avons pratiquement pas vu de voitures. De Sauveterre à Bordeaux, nous avons suivi la piste cyclable de Roger Lapébie (vainqueur du Tour de France en 1937) qui est également magnifique. Il s’agit d’une ancienne voie ferrée qui traverse des vignobles au début et des forêts sur les 15 derniers kilomètres jusqu’à la banlieue de Bordeaux”.
Pour finir
L’opinion générale selon laquelle il est ennuyeux de faire du vélo le long d’un canal ne s’applique certainement pas au canal du Midi et au canal de Garonne. D’une part, il y a beaucoup de variété et, d’autre part, la tranquillité est un soulagement. En tout cas, ce n’est pas du tout comparable à la promenade à vélo le long du canal Albert, même si cela peut être charmant d’une autre manière !
Text and photos: Teus Korporaal
